Notre intuition ne constituerait pas forcément notre 6e sens mais un énième sens parmi des dizaines d’autres. Cependant on peut admettre que le sens de l’intuition se distingue par sa complexité et son extraordinaire richesse. L’intuition semblerait faire une synthèse à la fois de plusieurs informations provenant d’autres sens mais également d’informations recueillies par notre expérience : une synthèse temporelle et physiologique en quelque sorte.
Dès l’Antiquité, les philosophes grecs ont reconnu l’existence du pouvoir intuitif de l’Homme et ses vertus en ce qu’il nous permet d’accéder immédiatement à la vérité et à la réalité. Plus tard, Descartes considérait que la connaissance prenait forme à partir de la déduction mais aussi et surtout grâce à l’intuition. Il considérait même que l’intuition était supérieure à la déduction car elle était la première porte d’entrée à la connaissance et la vérité. Bergson, quant à lui, a identifié l’intuition comme une méthode de connaissance supérieure en tant que telle : une manière unique de mieux nous connaître. L’intuition représente notre vie intérieure et nos émotions et s’oppose en ce sens à l’intelligence qui n’est que la compréhension du « matériel » et donc plus restrictive. Pour Bergson, en prenant conscience de soi et de notre vie intérieure, on accède au temps subjectif, au temps réel et vécu. Nous gagnons des espaces de liberté que le temps objectif et scientifique ne connait pas. Le siècle des Lumières au XVIIIe siècle marquera une rupture. Les philosophes valoriseront l’approche scientifique et relègueront l’intuition et l’approche intuitive au second plan. Ils identifieront une scission entre les sciences, le relationnel et la méthode d’un côté et le sensible, le subjectif, l’irrationnel et le spirituel de l’autre. Nous percevons encore aujourd’hui de manière très nette les traces de cette opposition. Début du XXe siècle, les recherches et les expérimentations se sont développées. Les sciences commencent à s’emparer du sujet. Le médecin, psychiatre et psychologue Carl Gustav Jung définie, dès les années 30, l’intuition comme l’une des quatre fonctions indispensables au développement de notre personnalité. Le psychologue canadien Daniel Cappon crée alors en 1970 le premier test d’évaluation du quotient intuitif (IQ2). Depuis 2000, les neuroscientifiques ont avancé dans leurs travaux et ils découvrent peu à peu que l’intuition n’a rien de « paranormal » et d’irrationnel mais qu’il s’agit au contraire d’un mécanisme hautement sophistiqué et ultra rapide. Neurones miroirs, neuroplasticité, neurones gliales : ce sont autant de nouvelles découvertes qui révolutionnent notre manière de comprendre le fonctionnement du cerveau et apportent de nouveaux éléments de réponse sur l’intuition. Comprendre et percer le mystère de l’intuition revient à percer le mystère du cerveau. Son fonctionnement demeure encore une énigme. En 2004, des chercheurs de l’Université de Rochester aux États-Unis ont découvert que 80 % de l’activité de notre cerveau était inconsciente. Notre intuition serait ainsi le travail et le résultat de cette activité cachée ; cette capacité encore incomprise qui consisterait à interroger ce réservoir invisible. Certains neurologues indiquent que l’hémisphère droit du cerveau serait plus activé en cas d’intuition alors que d’autres affirment que cela serait le cerveau reptilien, la partie la plus ancienne du cerveau. Enfin, certains ne localisent pas précisément l’intuition dans le cerveau et font référence à des notions de physiques quantiques pour démontrer que l’intuition serait indépendante du temps et de l’espace. Pour aller plus loin, des études ont montré que notre cœur pouvait réagir avant notre cerveau à certaines informations intuitives plutôt émotionnelles. Nous pourrions alors nous poser une question légitime : avons-nous les moyens et les capacités pour comprendre aujourd’hui ce qu’est l’intuition ? Nous décortiquons ce phénomène interne selon nos méthodes scientifiques et selon des raisonnements intellectuels logico-mathématiques. Mais cette intuition sortirait justement de cette sphère et échapperait à nos modèles et à nos références. Le paradoxe se situe bien là. Avons-nous la bonne posture pour percer le mystère de l’intuition et du cerveau ? Bref, sommes-nous finalement assez intuitifs pour dialoguer avec l’intuition ? On ne le sait pas encore mais comme le disait Mozart en parlant de ses pensées musicales : « D’où viennent-elles et comment ? Je n’en sais fichtre rien – et je n’en ai rien à cirer ! ». Intuition et raison : la cohabitation incomprise. Si la science s’évertue à louer la méthode, la rigueur et la démonstration comme les socles de la connaissance et de la découverte, les scientifiques s’accordent aussi à ajouter l’intuition aux ingrédients nécessaires dans leurs démarches. Paradoxalement, il règne comme un silence « organisé » ou consensuel dans la communauté scientifique autour de l’intuition, pourtant motrice des grandes découvertes scientifiques. Les scientifiques auraient du mal à expliquer « scientifiquement », leur manière de « trouver » et de « sentir » qu’ils sont sur la voie. Le reste ne serait que démonstration. Les plus grands scientifiques ont témoigné à plusieurs reprises sur ces moments de génie, cet « éclat soudain de l’éclair » comme l’exprimait Carl Friedich Gauss. Poincaré pouvait même analyser précisément ses moments d’intuition en les comparant à des « apparences d’illuminations subites, signe manifeste d’un long travail inconscient ». Par ailleurs, une récente étude scientifique, certainement trop faiblement médiatisée, a démontré l’efficacité du pouvoir intuitif dans les prises de décisions. Les chercheurs du département des sciences psychologiques de l’American Friends of Tel Aviv University ont en effet pu étudier l’efficacité de l’intuition dans les processus décisionnels des personnes. Les participants devaient choisir parmi deux options. Dans 90 % des cas, leurs choix intuitifs étaient le bon. Mieux, plus la problématique se complexifiait, meilleurs étaient les résultats. Nos sociétés occidentales contemporaines accordent bien plus d’importance à un intellect raisonné qu’à une intuition inexplicable et furtive. Pourtant, la Raison se trompe et connait donc des limites. Notre société oppose la pensée rationnelle, rigoureuse et rassurante à une intelligence intuitive irrationnelle, imprévisible, inconsciente et surprenante. On encourage la raison alors même que les résultats issus du processus cognitif de réflexion ne sont pas infaillibles. Nous ne comptons plus le nombre de catastrophes suite à des erreurs de raisonnements, des calculs faux, des approximations ou de mauvaises analyses. L’explosion de la navette spatiale Challenger en 1986 par exemple en témoigne. La science, les mathématiques et le raisonnement sont confrontés à certaines limites. La science ne peut pas tout expliquer et considère comme faux ce qui ne peut être démontré. Cependant les mathématiciens sont parvenus à accepter l’idée même qu’une Vérité n’est pas forcément démontrable ou prouvable. D’un point de vue technique, c’est Kurt Godel qui a même théorisé le concept d’inconsistance (on peut démontrer une chose et son contraire) et le concept d’incomplétude (il existe des vérités qu’il est impossible de démontrer). Notre société occidentale n’offre pas (encore) une place suffisamment importante à l’intuition, préférant privilégier un intellect bien raisonné. Notre système scolaire et éducatif nous impose la voie ou plutôt l’autoroute de la démonstration en délaissant toute une partie de la psyché humaine incomprise dont l’intuition, pourtant riche et efficace. L’intuition aide finalement à s’extraire d’un système limité et englué dans certains problèmes insolubles. Einstein soulignait d’ailleurs que les problèmes majeurs que nous connaissons ne peuvent être résolus au même niveau de pensée auquel ils ont été créés. L’intelligence rationnelle, la science et l’analyse nous ont permis de faire des découvertes scientifiques remarquables et profitables à l’évolution de l’espèce humaine mais au détriment de l’intelligence intuitive pourtant complémentaire. Votre coach (by "Intelligence Coaching Montpellier") peut vous apporter un un éclairage sur votre génie... Les commentaires sont fermés.
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